Une frondeuse, une aventurière. Après cinquante ans de parcours créatif, "l'enfant terrible de la mode" s'est éteinte. Connue pour avoir transporté l'esprit punk dans son approche de la création vestimentaire, Vivienne Westwood, née Vivienne Isabel Swire, est décédée le 29 décembre 2022. La radicale du street style est partie, ainsi que le font savoir ses représentants légaux, "paisiblement et entourée de sa famille, à Clapham, dans le sud de Londres." Elle avait 81 ans.
Une femme en mouvement permanent. Après avoir suivi des cours d'orfèvrerie, à Westminster, elle avait dans un premier temps abandonné l'idée de vivre de l'art ("Comment une fille de la classe ouvrière comme moi aurait-elle pu joindre les deux bouts dans cet univers ?"), sans pour autant renoncer à l'acte de créer : elle travaillait en autonomie sa propre production joaillière. Un temps va le travail en usine, elle devient institutrice. Deux premiers mariages : avec Hoover Westwood d'abord, au début des années 1960 (un fils, Benjamin, né en 1963). Plus tard bien sûr, avec celui qui jouera un rôle fondamental dans une histoire qui dépassera la sphère privée et s'avèrera un tournant complet pour une génération, voire plusieurs : Malcolm McLaren. Avec lui, un autre fils : Joseph Corré, en 1967.
C'est que dans le courant des années 1970 que Vivienne s'autonomise en tant qu'artiste, et ce dans le domaine de la création vestimentaire. Avec McLaren, elle crée sur King's Road la boutique qui deviendra SEX en 1974, lieu de rencontre de l'underground et des contre-cultures, et où un temps travailla Chrissie Hynde (Pretenders). Ceux qui sont passés devant en gardent certainement un souvenir ému, tant l'approche avait du... tranchant. Peace & Love ? Mes fesses ! La Reine Elizabeth aura son t-shirt, et plus tard les soutiens-gorge passeront par-dessus les robes. McLaren devient le manager des Sex Pistols et la création du couple, portée par le groupe et par d'autres, marque l'époque en profondeur. Mais Vivienne n'a jamais voulu n'être que "la femme de" et s'émancipera créativement après la fin de sa relation avec McLaren. Elle tient les rênes et poursuivra sur sa lancée jusqu'à aujourd'hui, imprégnant nombre de domaines créatifs dont celui du jeu vidéo (Final Fantasy XV).
Féministe et militante d'une durabilité du port du vêtement (position environnementaliste pour le moins rare et alternative dans le monde de ladite création, mais sujette à débat), Vivienne était encore à Paris pour défendre sa création en mars dernier. À sa mort, elle laisse des projets en jachère à son mari Andreas Kronthaller, devenu directeur artistique de la marque depuis 2016. Kronthaller s'engage à poursuivre le travail, ainsi qu'il l'affirme dans un communiqué repris par l'agence PA. Les chutes de tissu n'ont pas fini de faire parler d'elles. Rien ne meurt, tout se transforme.
