Deafheaven célèbre ses dix ans d’existence sous une forme originale. Privés de tournée pour cause de pandémie, les musiciens investissent les studios Atomic Garden avec leur pote Jack Shirley pour enregistrer le live qu’ils auraient dû proposer au public. Les huit morceaux choisis (dont "Daedalus", leur toute première chanson composée) définissent leur art forgé au cours d’une décennie qui les hissera au sommet de la frange alternative du metal. Néanmoins, le quintette de San Francisco divise. Traité par certains d’épouvantables poseurs hipsters dénaturant l’esprit du véritable black metal, il suscite également une admiration béate auprès notamment des critiques (leur mythique Sunbather – qui figure en bonne place ici – a été classé parmi les meilleurs albums du genre de tous les temps par le site de référence Album Of The Year).
10 Years Gone est un condensé de brutalité asphyxiante, gorgé d’émotions et de breaks atmosphériques splendides ("From the Kettle onto the Coil", "Vertigo", "The Pecan Tree"). Nous estimons grandement cette recherche de l’évasion, de la catharsis mélancolique et cette homogénéité stylistique. La marque Deafheaven jaillit en permanence tout au long de ces longs titres puissants et évocateurs. La férocité BM typique prime dès l’ouverture, puis revient au cours de crescendos épiques ("Dream House"). Les blast beats sont légion et déterminent des schémas grandiloquents, rappelant à l’occasion Emperor ("The Pecan Tree"). Cette rage omniprésente nous inonde, le chant de George Clarke n’a jamais été aussi expressif. Ses hurlements renforcent l’impact romantique des plans instrumentaux subtilement mélodiques ("From the Kettle onto the Coil", "Vertigo", "Glint"). Ce mélange entre post-rock et black metal est particulièrement harmonieux, un chemin délicat qui a prospéré dernièrement, grâce entre autres à Alcest, Wolves In The Throne Room ou Sólstafir. Ce désespoir nous fait du bien, tout est parfaitement en place, et la formation américaine reste toujours aussi démonstrative.
