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Album
05/04/2023

Havemeyer

Slacker

Label : Crazysane Records
Genre : shoegaze pop / afterpunk
Date de sortie : 2023/03/03
Note : 65%
Posté par : Sylvaïn Nicolino

Délicatesse et shoegaze. On revient de plein pied dans cette veine rock éthérée et non pas noise avec cet album. Il y a quelque chose de la douceur des Field Mice ("When Morning comes to Town"), mais en plus suave encore avec Havemeyer. Malgré cette dose de sucre, le résultat reste magique, sans doute grâce à cette préciosité toute anglaise ("Hold the Line"). Pourtant, ne nous y trompons pas : les musiciens sont des Allemands et résident à Berlin. Les leçons des Smiths sont intégrées, avec des menus arpèges qui tricotent, prouvant une fois de plus que le jeu des influences se moque autant de la géographie que des dates.

Du shoegaze, donc, à prendre avec un soupçon de nostalgie pour lers plus anciens. Avec en tête les pointures du genre (Chapterhouse, My Bloody Valentine, Ride, Lush, Slowdive), on distingue en premières écoutes un manque de rythme plus fort qui pénalise certains titres : à être dans l’atmosphère, on prend le risque d’être dans les nuages et "Headlines" passe comme un courant d’air avant les pulsations plus rock de "Wave It off". Sur ce titre, la nonchalance de la voix évoquera les débuts de Dinosaur Jr (pas pour rien que l'album se nomme Slacker, hé ?), quand bien même la qualité de la musique montre un travail rythmique plus prononcé, plus travaillé. "Pick Me up", plus lent et introspectif pâtit d'un jeu élégant, mais sans surprise : les fioritures, tant de la basse que de la guitare ont déjà été entendues mille fois et le charme n'agit pas. "Breathless", malgré un timbre qui manque de grave, évoque même la nonchalance triste sur laquelle jouent parfois Editors. "Swim", nerveux et précis remporte aussi la mise en fin d'album : ces climats plus emportés et acérés sont une piste à suivre (avec un soupçon de sonorités surf qui ne demandent qu'à exploser). Par une mise en valeur plus forte (on aimerait ainsi que la basse transperce davantage qu’elle ne caresse sur la majorité des titres), on aurait des titres presque mélo-grunge dans une lignée Sonic Youth des années 2000 – pas la meilleure, mais pas non plus insipide.

Alors que le genre voit sa frange la plus abrupte délivrer des albums de haute volée (A Place To Bury Strangers) et que d'autres distillent les harmonies cotonneuses (The Radio Dept), Havemeyer a un coup à jouer en se glissant dans la cohorte. La belle pochette nimbée de bleus passés appelle aussi à soigner davantage les visuels : pour l'instant l'allure des quatre musiciens manque d'une aura plus puissante. Or, dans un registre daté et correctement arpenté, il faudra tout faire pour creuser sa place. La simplicité d'une construction sur laquelle se greffent des détails nombreux, la manière dont la mélodie s'incruste et la tenue des arrangements ("Wave it off", encore) laissent entrevoir un talent certain : les possibles s'ouvrent.

Tracklist
  • 01. Vanishing
  • 02. Hold the Line
  • 03. Headlines
  • 04. Wave it off
  • 05. Moonlight
  • 06. Pick me up
  • 07. Breathless
  • 08. Swim
  • 09. Two Weeks