"Skasé", ça veut dire "Ta Gueule" en grec mais on n'obéira pas : Larsovitch (Théo seul aux commandes) mérite qu'on parle de lui. Son EP sous format cassette et numérique est riche de potentiels multiples. Il suit ce mois de février un premier jet (avec un titre en moins) paru en avril 2023. Mais cette fois, la promotion est vraiment lancée. Une electro dansante, agressive, empruntant un peu à l'EBM, un peu encore à la new wave, encore plus à une pop déjantée et taquine. Oui, "Skasé" nous plaît bien, plus par ses sons et son esprit que par sa richesse mélodique, finalement très minimaliste.
Lorsqu'il se lance dans une veine cold revival, on sourit béatement : "Béton armé" est là pour draguer les fans de Oi Boys, Litovsk, Gwendoline. Moins rock et méchant que certains, Larsovitch a de manière innée ce sens de la formule et des détails dans les arrangements qui fondent un tube en puissance. On aimera cette espèce de second degré ironique tant dans les paroles ("il y avait un immeuble désaffecté / j'ai trouvé un abri pour l'été") que dans les sonorités rétro-cheap. La voix juvénile, dans les médiums, expose force et fragilité, captivante comme du cheap-tune de jeux vidéo d'arcade, le sentiment d'étrangeté passéiste étant renforcé par l'emploi de la langue russe, comme si on avait retrouvé un de ces groupes de 1986, influencé avec quelques mois de décalage par OMD, New Order et Duran Duran ("Moy Stakan").
On passe alors au plat de résistance : "Konputa" est sourd, grave, possédé. Un classique immédiat, avec le retour de notre langue française pour la voix chantée en plus grave et monocorde. C'est racé, daté (certes : c'est un parti-pris), efficace. Les méchants les plus âgés y chercheront un pastiche façon Les Inconnus mais peineront à y trouver de quoi rire, les bienveillants finiront pas céder à l'envie de taper du pied et guetteront l'un des nombreux concerts programmés pour le printemps. Les jeunes adoreront placer sur une vidéo tik-tok la mélodie acidulée de "KAPΔIEΣ", qui sait ? Molchat Doma a bénéficié de cet engouement... On est complètement dans un état d'esprit qui a assimilé les codes et ne s'encombre pas de doutes : ça cartonne et c'est droit au but, avec même des guitares saturées qui rudoient les oreilles.
C'est désormais toute une équipe qui se fédère autour de Théo et son Larsovitch, installé à la Friche-Mimi (Montpellier et Sète, plus précisément à Lavérune) : coaching scénique, réalisation vidéo, lncement d'un studio d'enregistrement et de création. Tout un package donc sur lequel on peut fantasmer avec un joli mot d'ordre : "s'inspirer des temps décadents : faire danser la multitude". Larsovitch, comme Potochkine, Kompromat, Maria Violenza, ne se battent pas que pour leurs noms mais portent malgré eux des espoirs : les challengers en France se multiplient, sans qu'on ait pour le moment de véritable tenant du titre. Qui sait ? À force de petits buzz, finira-t-on par avoir une dynamique de spectateurs / acheteurs ? Nos scènes indé en ont bien besoin.
