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Album
16/02/2021

Nero Kane

Tales Of Faith And Lunacy

Label : Nasoni Records / BloodRock Records / Anacortes Records
Genre : dark americana
Date de sortie : 2020/10/30
Note : 78%
Posté par : Mäx Lachaud

Tout chez Nero Kane pourrait faire penser qu’on est face à un projet américain, pourtant c’est bien d’Italie et de Milan que nous vient ce duo fort marqué par les bandes originales du duo Nick Cave / Warren Ellis et par l’esthétique american gothic. Une grosse dose de spiritualité et de religion, des évocations de déserts infinis et un sentiment crépusculaire hantent chacun des sept titres de ce second album après un premier Love In A Dying World en 2018. Entre temps, le rôle de Samantha Stella (voix, synthés, visuels) est devenu bien plus important, voire primordial, avec sa voix grave qui rappelle souvent le chant de Nico de la période The Marble Index / Desertshore. Le projet semble d’ailleurs puiser ses sources dans cette fin des années 1960, que ce soit l’approche la plus ambient du psychédélisme telle qu’on peut la trouver sur un titre comme "We Will Fall" des Stooges ou le travail d’Ennio Morricone pour de nombreux westerns spaghettis de l’époque (notamment Il Etait Une Fois Dans l’Ouest).

Produit avec élégance par Matt Bordin en Italie, l’album se présente comme une collection de ballades à la guitare, mais ces accords minimalistes sont toujours étoffés par des drones, violons (joués par Nicola Manzan, alias Bologna Violenta), claviers et couches de guitares qui, mêlées aux incantations drapées d’échos, finissent parfois par évoquer la densité des Swans (le final de "Lord Won’t Come", comme une explosion de lumière). Lettrés, les musiciens en appellent autant à la littérature médiévale (« Mechthild » inspiré par une écrivaine mystique du XIIIe siècle) qu’au roman contemporain (Cormac McCarthy pour "Lost was the Road"), et leur univers doit indéniablement beaucoup au cinéma des grands espaces. On imagine des étendues arides et poussiéreuses, un vent menaçant et un décor écrasé par le soleil. Là où on croiserait des signes religieux sur les bords des routes et où les croix sont légion.

Car il est question de foi ici, et des sentiments de dévotion et d’amour qui l’accompagnent parfois ("Mary of Silence", "Magdalene"). Mais derrière ces enrobages éthérés, se niche aussi une grande noirceur et la mélancolie qui fait déchoir les anges ("Angelene’s Desert").

Tales Of Faith And Lunacy nous présente ainsi des litanies lascives sur motifs simples et répétitifs qui cherchent tous à mener à une forme d’élévation. Certains pourront y trouver le spectre mélodique et spirituel d’un King Dude ou même d’un Blue Angel Lounge, mais pas de rythmes ici. Une lenteur hypnotique les a remplacés. L’énergie a laissé place à une forme de folk psychédélique qui emprunte beaucoup à la scène drone pour éveiller une imagerie dense mais comme paralysée par une canicule sans merci. Une musique qui s’apprécie en particulier au volant de sa voiture.

Tracklist
  • 01. Lord won’t come
  • 02. Mechthild
  • 03. Mary of Silence
  • 04. Magdalene
  • 05. Lost was the Road
  • 06. I believe
  • 07. Angelene’s Desert