En 2021, Nazteratom a sorti en auto-édition un recueil d'une dizaine de nouvelles consacrées à une partie des monstres nocturnes. Aujourd'hui, on a une bande-son illustrée façon série Z composée par Sona Nyl ; elle existait en digital, elle est désormais en format physique.
Alors que les dessins officient dans un style qui nous plonge dans des délices à la Cramps, au psycho-billy, voire aux prémices du thrash, la musique prend un chemin de traverse. Pas de guitares, mais des claviers et des textures composent une musique instrumentale. Non, ce n'est pas non plus une bande originale sous obédience John Carpenter. On est davantage dans une pincée de rétro avec quelques sons hérités des années 1970 (Popol Vuh, Klaus Schulze, Tangerine Dream) pour leur côté tridimensionnel. Même si la modernité est si forte qu'on n'entendra pas ici de plagiat des quelques secondes du générique de la série Stranger Things. Pas de ballade dans les années 1980, on est bien dans une musique qui a grandi avec l'ambient et le cinématographique. Quand il y a des morceaux, ceux-ci tiennent avec une accroche mélodique forte, enivrante ("Skull") et l'explorent par la répétition sur quelques minutes, jamais trop.
Sona Myl ne bascule pas non plus dans la facilité du dansant, Perturbator, Dan Terminus et autres Carpenter Brut n'ont pas irradié ces pistes : "Jeux d'Enfants" est gentiment rythmé, mais en restant dans le délicat, comme l'indique son titre (certainement ironique, je n'ai pas lu cette nouvelle). Pas de big beat, mais un up-tempo comme un slow qui nous ferait quitter notre corps ou celui de notre partenaire pour tourner les bras en croix. "Retour chez les Vourdalaks" laisse l'héroïsme à la porte d'entrée de la tente de combat, il est là, mais léger, léger !
L'agencement des pistes est progressif : j'aime ce dévoilement par superpositions ("Le Pouvoir") car elle nous place dans un cocon et propose des couches successives à notre sensibilité, permettant de revenir goûter la première alors que la cinquième est à portée d'oreille. Et puis, on découvre des compositions plus sombres, plus ténébreuses et inquiétantes ("Mirage", l'insidieux "Nous sommes une Légende"). Les sonorités vont chercher tout ce qui sonne, piochant dans la chaleur des cuivres et des toms pour "Devenir un Dieu", dans les cordes pour "Quand le Monde s'agenouillera devant Toi" : ces nappes sont là pour suggérer et créer un décor plus que des actions.
C'est bien cette optique qui donne force à ce projet sonore : puisque la partie visuelle est assurée par le dessinateur Lorenzo Bis (Nazty Comics), et que les textes sont de Nazteratom, il ne fallait pas en faire trop, pas déborder. Alors, plutôt que tabasser, Sona Nyl a choisi la voie plus compliquée de la suggestion, elle réclame de l'attention, de la disponibilité, du temps. Ensuite, c'est juste un plaisir (dix écoutes alors que j'ai des chroniques en retard). À vous de voir / de lire / d'écouter.