The Last Oath, actifs depuis 2013, font partie de ces artisans tendant à prolonger diverses traditions sombres anciennes (gothic, death rock, post-punk) tout en y insufflant la puissance rythmique de ces musiques un temps considérées comme "ennemies" des premières. Dans les années 1980, goths et metalheads se regardaient en chiens de faïence, mais l’époque est révolue : le gothic metal a formé un point de croisement, d’entente : les années 1990 sont celles du rapprochement pour ces tribus (les metalheads sont venus vers les goths, peut-être plus que l’inverse pour ce qui concerne les générations nées dans les années 1960 et 1970). The Last Oath sont des gens nés plus tard et, typiquement, font partie de ces générations "d’après" qui ne voient pas pourquoi elles choisiraient une chapelle.
Non que l’influrence du metal soit si prégnante que cela à l’écoute du nouvel album Smile Of The Moon. Vous en ressentez la vibration dans la manière dont la rythmique attaque : frontale, une tendance en elle à des lourdeurs que se seraient moins permises les tenants de l’afterpunk 80’s (à l’exception de ceux qui n’ont peur de rien – cf. Killing Joke). Cette vibration est présente ("Like Hell" est l’un des titres les plus enlevés et frontaux) mais l’essentiel des instrumentations a cette vibration acide que vous retrouveriez dans les guitares qui ont essaimé dans les années 1980, 1990. Pensez Christian Death, Mephisto Walz, et consorts.
Décadence européenne, mécaniques de l’horreur américaines : échos des musiques anciennes, de ces choses vous travaillent. The Last Oath ont grandi en tant que groupe, et l’émerveillement éprouvé à l’évidence – moult signes qu’ils portent le revendiquent – devant ces typologies sonores datées s’est ancré en eux. Il y a culture, pas simplement posture : la manière dont sonnent les guitares, leurs filets, leurs placement, la percussion de la basse, sont les marqueurs d’un instinct. Le placement des voix, lui, a fortement gagné en maîtrise depuis les premiers enregistrements. Xzvrey, sur Smile Of The Moon, trouve des manières et une émotion qui, à plusieurs reprises, soulèvent : là où la performance live a quelque chose de brut et ressort davantage de la déclamation, le son studio 2025 se remarque pour une gestion retenue de la puissance et une quête mélodique accentuée. Le chant transpire de plus d’émotion, les mélodies se retiennent ("Universe", une ambition de structure et d’écriture tout court, un moment fort de l’album).
Cette retenue sert les nouvelles compositions, elle les sert fortement. Leur énergie est rentrée, en même temps qu’elles transportent une vibration épique ("Sun will not rise"). Une épaisseur a été gagnée, une rythmique s’est solidifiée, un supplément d’âme émerge. Une relève existe, et elle est en Hexagone.
