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02/01/2023

The March Violets

The Palace Of Infinite Darkness

Label : Jungle Records
Genre : gothic / afterpunk / drum machine rock
Date de sortie : 2022/11/18
Note : 80%
Posté par : Emmanuël Hennequin

Leeds, terroir du gothique anglais. Une histoire de feeling, de personnalités… et de drum machine : The Violets furent de ces précurseurs d’un rock sans batteur dans les années 1980. Un parcours qui se revit à travers les mots de la chanteuse et première frontwoman de l’histoire du groupe, Rosie Garland (dans une autre vie, Rosie Lugosi). Car elle retrace bien des choses dans le conséquent livret (44 pages) du bel ensemble publié fin 2022 par Jungle Records : un coffret comprenant 5 volumes CD et rassemblant l’essentiel des (bons) enregistrements du groupe fondé en 1981 par elle-même, Tom Ashton (guitare), Laurence "Loz" Elliot (basse) et Simon "Detroit" Denbigh (chant et, pour la petite histoire que nous ne saurions passer sous silence, nurse au long cours d’un certain Doktor Avalache, la boîte à rythmes des Sisters Of Mercy)

Le livret de ce Palace Of Infinite Darkness est au moins aussi passionnant à lire que l’ensemble des bandes à redécouvrir ici (ou à découvrir pour les chanceux néophytes). Rosie, poétesse et écrivaine depuis des années (elle-même ne sait pas dater ses premiers pas), retisse le fil tout en laissant micro ouvert aux acteurs majeurs de cette histoire. Où il est question d’influences (multiples), d’intentions plus que de contrôle, d’instinct, de précarité (oui, les groupes cultes sont parfois, souvent, des gens en situation précaire), de rencontres (Andrew Eldritch figure en bonne place), mais aussi d’un peu de plus de sérénité qu’Eldritch face à l’emploi du terme "gothique" qui, en presse comme dans le public, a qualifié (réduit ?) la musique du groupe. De justice, il est question aussi et enfin : la chanteuse Cleo Murray, remplaçante de Rosie à partir de 1983/1984, est fermement défendue et aimée dans le texte, et sa présence imprime fortement la matière photographique sur toute la seconde moitié du livret.

Bonheur que celui de replonger dans une œuvre marquée par les singles et EPs – c'est le propre de cette histoire – et où le format album a eu un destin curieux : il marque essentiellement les années récentes de production (non concernées par ce Palace) et ne contient pas que du neuf (Made Glorious en 2013 puis Mortality en 2015). La suite sera-t-elle autre ? Nous le saurons sur  2023-3024, période à laquelle The Violets (une nouvelle fois renforcée par William Faith à la basse [Faith & The Muse, Wreckage, Christian Death, Bellwether Syndicate]) délivrera peut-être autre chose que des ensembles mêlant nouveautés et remakes de classiques. Des dates live sont annoncées pour juin 2023 au Royaume-Uni. 

Mais l’heure est à la révision des classiques. La première partie du coffret concentre ce que les fans connaissent le mieux, à travers ces enregistrements studio qui peu à peu ont construit le culte : l’ensemble des singles et versions étendues monopolise un total de deux disques. Le reste concentre une matière un peu plus... "cachée", et qui aiguise l’appétit : trois volumes séparés, regroupant sessions BBC et raretés studio. La période 1982-1984 monopolise les volumes 3 et 4. Le volume 3 Big Soul Kiss (disponible aussi en format double-LP) regroupe les sessions BBC enregistrées pour John Peel, Kid Jensen et Richard Skinner, et c’est un pur joyau : dix-neuf titres parmi lesquels figurent – si l’on doit en citer quelques-uns – des versions enflammées de "Walk into the Sun", "Deep" ou encore "Snake Dance", mais où March Violets soignent aussi leurs ambiances ("Kill the Delight").

Le volume 4 Infinite Darkness (une série de démos, versions alternatives, live et raretés de la période 1982-1984) présente une facette assez brute du son du groupe. C’est le moment "racinaire" du coffret, à l’exception d’une prise live de 2007 pour "Steam". Sur le volume 5, la session BBC pour Janice Long côtoie des sessions studio enregistrées (notamment pour London Records, fin 1986) sur la fin de vie du dernier line-up des années 1980. Le volume, intéressant, se termine symboliquement sur la ferme version studio de 1987 du fameux "Snake Dance" enregistrée par Ashton et Murray.

Une histoire se décline ainsi en une presque centaine de prises différentes faisant mesurer la densité et la force d’intention qui gardèrent en mouvement un collectif autour de Tom Ashton. Collectif qui aujourd’hui réactive les forces en présence, mais cette suite de l'histoire reste pour l'heure à écrire. Aujourd'hui, Palace Of Infinite Darkness s'ouvre comme un ultime objet mémoriel.

Volumes
  • Disc 1 - PLAY LOUD PLAY PURPLE (Complete Singles 1982-85)
  • Disc 2 - PLAY LOUDER PLAY PURPLER (Extended Versions & Eras)
  • Disc 3 - BIG SOUL KISS (The BBC Recordings 1982-84)
  • Disc 4 - INFINITE DARKNESS (Unreleased Rarities 1982-84)
  • Disc 5 - SILVER LINING (Unreleased Rarities 1985-87)